Aller au contenu

Page:Chambon - Notes sur Prosper Mérimée, 1902.djvu/351

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LES HOXXEURS 32)

pas de se contenter du pain quotidien tout en cherchant de la brioche. Je suis un sultan jusqu'à 6 heures du soir dans le Harem de Carabanchel et les mauvaises langues m'appellent Apollon au milieu des neuf Muses. Le soir il arrive des jeunes gens et mon crédit baisse. Je me résigne d'assez bonne grâce au rôle de confident. Lorsque je vais à Madrid, je vais dans la mauvaise compagnie faire des études de mœurs. Vous ne sauriez croire, Madame, com- bien les gens du peuple sont aimables dans ce pays, com- bien d'esprit, de dignité et de grandeur d'àme on trouve dans des endroits où l'on ne s'imaginerait jamais le ren- contrer. Il y a près de mon logis de Madnd une jeune fille qui fabrique des cure-dents en bois à un sou le pa- quet, et qui est une Cendrillon divine. Il se peut bien que je lui offre mon cœur et ma main lorsque j'aurai fait assassiner le porteur d'eau qui est son amant. Le jour où la canaille de ce pavs s'apercevra combien elle est supé- rieure aux gens comme il faut, il y aura un beau tapage et un sens dessus dessous qui ne laissera rien à dé- sirer.

« Adieu, Madame, je vous quitte pour aller à Madrid voir si malgré le mauvais temps il y a des taureaux. Nous avons depuis 3 ou 4 jours un vent du diable et de la pluie. On m'assure que cela ne durera pas et que nous aurons un été de la S. Martin. Je compte en profiter pour faire un petit voyage dans les provinces du Nord que je suis venu pour voir. Mais il y a tant d'attractions ici qu'il est impossible de faire ce qu'on voudrait. J'espère que votre mari est arrivé en bonne santé à New York et que votre fils s'habitue à son pays. Veuillez leur dire- mille tendresses de ma part. Je suppose que vers le com-