Aller au contenu

Page:Chambon - Notes sur Prosper Mérimée, 1902.djvu/443

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LA SAXTÉ DE MÉRIMÉE 417

« Cannes, 16 janvier au soir.

« Mon cher Confrère

« Rien ne pouvait me faire plus de plaisir que la bonne nouvelle arrivée hier soir par le télégraphe, qui, par parenthèse, a pris vraisemblablement le moins court che- min, car je n'ai reçu votre dépèche qu'a 8 heures. Je vous ai répondu sur le champ par la même voie, avec la concision laconique réclamée par ce moyen de corres- pondance. Permettez-moi de vous répéter plus au long combien je suis heureux de ce succès. Le grand point est d'entrer in docto corpore, mais il est encore plus agréable de trouver les deux battants de la porte ouverts, comme ils ont été pour vous. Je me réjouis pour vous et pour nous de cette victoire. J'espère que nous la célébrerons bientôt rue de Lille où j'apprends qu'il est arrivé du vin de Porto.

« Je ne me porte pas trop mal. Je n'ai pas de rhume, et je vis toujours à l'air. Il est vrai que l'air est ici très chaud. J'abats des pommes de pin avec un arc chinois qui a appartenu cà un chef des Tae-ping, lequel a eu le malheur d'être coupé en 10.000 morceaux. C'était de son temps un rude homme, je vous assure, et son arc fait sur mes poumons l'effet d'un souffet de forge.

« Arago est à Nice et je ne le verrai que demain. Il passe son temps à consulter tout le monde sur sa maladie. Il se plaint toujours, excepté aux heures des repas où il travaille comme une personne en bonne santé; il est d'ailleurs sombre et taciturne, très différent de l'Arago d'autrefois.

« J'ai fait, je fais et je ferai des efforts pour vous appor- Chamison. — /'. Mérimée. 27