Page:Chambre d'assemblée du Bas-Canada, vendredi, 21 février 1834.djvu/46

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état de la province.

paroisses, et un autre acte qui rappelle en partie l’acte des tenures ; et cela quand le conseil était encore mal composé. Je ne parle pas du conseil tel qu’il est aujourd’hui. Je ne crois qu’il convienne de parler disconvenablement dans cette chambre d’une autre branche de la législature. Nous n’avons point d’injures à nous échanger ainsi. Voilà un apperçu de l’état de la Province en 1831 tel que communiqué dans notre adresse au gouvernement impérial, et des réponses qui nous ont été faites à ce sujet en 1832. Il serait bon de voir s’il n’y aurait pas de moyens de remédier aux abus qui règnent aujourd’hui. Qu’on fasse voir à l’Angleterre ce qui peut et ce qui doit être fait : nous remplirons notre devoir, et la charge sera grande contre ceux qui auront négligé le leur. Mais en attaquant le conseil, on s’est élevé une barrière contre bien des lois, qu’on aurait pu faire et qui auraient rencontré l’assentiment du Roi. Cette attaque contre l’existence d’un corps constitutionnel, m’empêche d’espérer qu’on nous accorde de sitôt une réforme contre bien des abus. Nous y avons mis nous-mêmes un obstacle. La constitution dans tout pays est la règle de conduite pour toutes ses parties et la sauve-garde de la liberté de chacun. Du moment qu’on l’attaque on ébranle les passions. Nous nous trouvons dans des circonstances différentes des celles des pays où il y a eu des changemens. En Angleterre et aux États-Unis, qu’on a cités, des changemens ont été opérés par le peuple, non par suite d’un goût pour la réforme, mais parce que les rois eux-mêmes voulaient altérer la constitution. La ligne de démarcation est bien distincte : ils combattaient pour des droits qui existaient ; et nous voulons renverser ceux qui sont établis. Le résultat doit être différent. L’histoire est un moniteur fidèle : elle nous apprend que les conséquences suivent le principe. Il est inutile que j’entre dans des détails, pour le prouver. Je finirai par proposer en amendement de subtituer les résolutions suivantes : — (Voir ci-devant).

M. Stuart : je conviens avec tout le monde que le pays se trouve dans une situation déplorable ; et je désire de tout mon cœur de l’en voir sortir. Je ne parlerai pas de nos griefs avec cette passion, que l’on a montrée, et m’abstiendrai d’entrer dans des objets entièrement étrangers à la question. Loin de moi toutes ces distinctions nationales, ces expressions exagérées et injurieuses que s’est permises dans la discussion l’hon. Orateur de cette chambre. Ces expressions sont extrêmement inconsidérées, et j’en laisse l’honneur à celui qui s’en est servi. Je sais que dans ce pays il est impossible d’empêcher les inconvéniens qui résultent du mélange de la population ; mais est-ce à nous à semer les dissentions, et à augmenter l’irritation ? Tel a parlé de distinctions, qui les suscite. J’ai eu occasion d’observer quelles sont les doctrines de plusieurs hon. membres de cette chambre ; et j’ai cru appercevoir dans la discussion plus de personnalité que de raisonnemens. Je vais m’attacher particulièrement à la question, et démontrer les résultats de ces résolutions de sang-froid, j’espère, et sans exaspération. Nous sommes appelés à dire ce que nous pensons sur l’état de la province. Nous sommes dans un moment de crise. Nous faut-il adopter des mesures propres à augmenter l’embarras et à exciter l’irritation ? Est-il conforme aux lois de la raison et de la prudence de tourner en même temps contre nous toutes les autorités ?

Je n’ai pas intention d’entrer dans les détails des résolutions, je ne veux envisager la question que sous un point de vue général. Je le ferai sans m’occuper d’aucune considération étrangère, et suivant ce que je crois être mon devoir. Depuis que je suis dans cette chambre le pays a toujours été divisé en deux partis ; à la tête de l’un est l’Orateur de la chambre ; et à la tête de l’autre l’Orateur du conseil. Dans les deux partis, on n’a pas su garder de bornes, et je ne saurais dire lequel est le plus fautif. Dans cette chambre j’ai été témoin qu’on s’est souvent arrêté à des distinctions nationales. Quels sont ceux qui ont été constamment dans la majorité ; sinon ceux qui sont d’origine Française ? Et d’un autre côté quels sont ceux qui occupent les places ? On y voit des personnes de toute origine. Des hommes, tirés de toutes les classes de la société, sont élevés aux divers postes d’honneur. Et qu’est ce qui rend un homme digne d’un emploi ? Ce n’est certes pas son origine ni son langage, mais sa conduite et ses talens. Si un homme est qualifié pour un emploi, qu’il l’occupe, peu importe son nom, ses relations, et ses idées politiques. On se plaint de la partialité dans la distribution des places ; quelqu’un, qui a occasion de fréquenter les bureaux publics peut-il se plaindre qu’on ait laissé entrevoir des préférences et des égards pour les uns plus que pour les autres ? Mais ce n’est pas le peuple qui est mécontent ; ce sont ceux qui se mêlent des affaires. Où sont donc dans ce pays, les esclaves dont on parle dans les résolutions ? Peut-être y en aura-t-il un jour, si ces résolutions sont adoptées. Ceux qui vantent tant leur amour pour la liberté, qu’ont-ils fait pour le pays ? Qu’ils nous montrent donc leur ouvrage. Ils ont suscité des mécontentemens, il est vrai ; ils ont su exciter les passions ; mais si ce sont là les fruits de la constitution, n’en ayons pas du tout plutôt. Il est de fait qu’autrefois il y a eu des abus. Ceux qui avaient le pouvoir, étaient des hommes peu éclairés, et dominés par les préjugés. Aussi, en 1810 on vit conduire sans raison dans les prisons des hommes respectables. Ce fut un acte de violence inexcusable. Mais aujourd’hui quelle nécessité y a t-il de mettre la Chambre en collision avec les autorités locales et extérieures ? Il n’y a pas un homme sensé qui ne convienne qu’une pareille lutte nous serait funeste à tous. Elle aurait l’effet sans doute de donner des forces à la minorité dans cette colonie, contre la majorité qui se plaint. Voilà quel en serait le résultat. Comme représentant du peu-