Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t2.djvu/117

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Io6 OEUVRES

— N.... disait qu’il fallait toujours examiner si la liaison d’une femme et d’un homme est d’âme à âme, ou de corps à corps ; si celle d’un parti- culier et d’un homme en place ou 4’un homme de la cour, est de sentiment à sentiment, ou de position à position, etc.

— On proposait un mariage à M... ; il répon- dit : «Il y a deux choses que j’ai toujours aimées à la folie; ce sont les femmes et le célibat. J’ai perdu ma première passion, il faut que je conserve la seconde. »

— « La rareté d’un sentiment vrai fait que je m’arrête quelquefois dans les rues à regarder un chien ronger un os : c’est au retour de Versailles, Marly, Fontainebleau, disait M. de..., que je suis plus curieux de ce spectacle. »

— M. Thomas me disait un jour : « Je n’ai pas besoin de mes contemporains ; mais j’ai besoin de la postérité. » Il aimait beaucoup la gloire. « Beau résultat de philosophie, lui dis-je, de pouvoir se passer des vivans, pour avoir besoin de ceux qui ne sont pas nés ! «

— N.... disait à M. Barthe: « Depuis dix ans que je vous connais, j’ai toujours cru qu’il était im- possible d’être votre ami ; mais je me suis trompé ; il y en aurait un moyen. — Et lequel? — Celui de faire une parfaite abnégation de soi, et d’adorer sans cesse votre égoïsme. »

— M. de R... était autrefois moins dur et moins dénigrant qu’aujourd’hui ; il a usé toute son indul-