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312 ŒUVRES

temps et de la liberté! On n’auraitpoint à joindre à ces justes éloges des regrets non moins justes : on n’aurait point à reprocher aux gardes-fran- çaises les inquiétudes qu’ils ont données à la li- berté naissante, après l’avoir assurée par leur courage : ils n’auraient pas envié à leurs conci- toyens, à leurs frères, vainqueurs de la Bastille, le modeste honneur dû à ceux qui les avaient ai- dés à renverser cette forteresse du despotisme. Braves gardes-françaises, l’empreinte d’une cou- ronne murale, tracée dans une broderie au bras de vos concitoyens qui, sans être guerriers de profession, se sont montrés intrépides comme vous, dignes de combattre auprès de vous, n’eût fait que rehausser l’éclat de la médaille d’or dont vous êtes décorés. Mais vous avez eu le triste avantage de l’emporter dans ces odieux débats si effrayans pour la patrie. L’assemblée nationale s’est vue, pour la première fois, contrainte de dé- roger à l’un de ses décrets, jusqu’alors immuables. C’est vous, qui, opposant à la puissance des lois la puissance de l’épée, l’avez forcée à recevoir, comme une offrande généreuse, comme un nou- veau don patriotique, le sacrifice que les vain- queurs de la Bastille firent de leur vœu le plus ardent. Ne reprochons point à nos législateurs une prudence nécessaire, qui a sauvé à la capitale des scènes de sang, et arraché à nos ennemis une de leurs cruelles espérances. L’assemblée natio- nale voulut voir dans la conduite des sardes-fran-