Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t2.djvu/331

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dites-leur que je ne sers point contre eux. Je ne tirerai point l'épée contre les Parisiens : je suis ici pour donner du secours à la ville, dans le cas où elle en aurait besoin contre les brigands. » Le jeune homme, frappé de Cette apparente émotion du général, et persévérant dans l’espérance de l’engager à la retraite, lui dit que la seule manière de secourir Paris, c’est d’en éloigner les troupes, dont le voisinage y redouble les périls et les alarmes ; que la retraite du général peut seule prévenir l’effusion du sang humain et le carnage dont le Champ-de-Mars va être infailliblement le théâtre. Le général répond qu’il va prendre les ordres de la cour. « Ne prenez, monsieur, lui réplique-t-il, ne prenez l’ordre que de vous-même, de votre amour pour la paix, si vous ne voulez répandre à pure perte, dans cette même place, le sang de vos concitoyens, prêts d’attaquer, au nombre de cent mille hommes, quelques milliers de vos soldats.» Toujours plus surpris, mais plus ému, soit crainte, soit humanité, le pénéral promit de ne point venir à Paris, d’éviter tout engagement avec les citoyens, et congédia M. Mandar, qui, rassuré sur les dispositions de M. Besenval, se retira plein de joie, et, à peine hors du camp, eut le plaisir d’entendre sonner la retraite.

Cette retraite, bientôt connue des Parisiens, sans qu’ils sussent la principale circonstance qui avait pu, sinon la déterminer, du moins la hâter de quelques heures, diminua les inquiétudes