Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t3.djvu/441

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l'exemple, de la nécessité de réprimer la liberté de penser : mais en général , et sauf quelques ex- -ceptions , la cour et le grand inonde ont toujours cru que l'état des choses où ils vivaient , é.tait in- destructible ; et cette sécurité a duré jusqu'à ia convocation des états-généraux, qui a commencé à faire un peu ouvrir les yeux.

Pour ce qui est de iîousseau , ses ouvrages politiques , et particulièrement le Contrat social ^ qui est son chef-d'œuvre en ce genre , étaient faits pour peu de lecteurs , et n'inspiraient à la cour aucune alarme. C'était, sans nulle compa- raison , ce qu'on avait écrit de plus fort et de plus hardi sur les principes de l'ordre social et poli- tique , et c'est cela mcnie qui fit que le gouver- nement n'y prît pas garde. On ne regardait cette théorie que comme une spéculation creuse, qui ne pouvait pas avoir plus de conséquence que l'en- thousiasme de liberté et le mépris de îa royauté, poussés si loin dans les pièces de Corneille, et ap- plaudis à la cour du plus absolu des rois, Louis xiv. Tout cela paraissait élre d'un autre monde , et sans nul rapport avec le nôtre. Les gens bien instruits peuvent se souvenir que, quand le Con- trat social parut, il fit très-peu de sensation , et n'attira nullement les regards de ce même gou- vernement qui fit tant de bruit pour \ Emile. C'est que XEmile^ qui avait l'intérêt et ie charme d'un roman , fut dévoré à la première lecture, III 28

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