Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t4.djvu/92

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

84 ŒUVRES

fie les y ramener, à l'aide d'un peu d'explication.

Le but de nos récits étant donc de porter la terreur et la pitié le plus loin qu'elles puissent al- ler, il est évident qu'ils ne doivent renfermer que les circonstances qui conduisent à ce but.

Dans l'événement le plus triste et le plus ter- rible, tout n'est pas également capable d'imprimer de la terreur ou de faire couler des larmes. Il y a donc un choix à faire; et ce choix commence par écarter les circonstances frivoles, petites et pué- riles. Voilà la première règle prescrite par Lon- gin ; et sa nécessité se fait si bien sentir qu'il est inutile de la détailler plus au long.

La seconde règle est de préférer, dans le choix des circonstances , celles qui sont principales. La raison de cette règle est claire. Il est impossible , moralement parlant, que, dans les grands mouve- inens,le feu de l'orateur ou du poète se soutienne toujours au même degré. Pendant qu'on passe en revue une longue file de circonstances , le feu se ralentit nécessairement , et l'impression qu'on veut faire sur l'auditeur languit en même temps. Le pathétique manque une partie de son effet ; et l'on peut dire que , dès qu'il en manque une partie, il le perd tout entier. Cette seconde règle n'est pas moins nécessaire pour nos récits que la première. Les personnages qui les font, sont dans une situa- tion extrêmement violente ; et ce que le poète leur fait dire, doit être une peinture exacte de leur situation. Le tumulte des passions qui les agitent.

�� �