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DE CHA5IFORT. 85

ne les rend eux-mêmes altentifs, dans le désordre d'mi premier monvement , qu'aux traits les plus frappans de ce qui s'est passé sons leurs yeux.

Je dis dans le désordre d'un premier monve- ment , parce que ce qu'ils racontent venant de se passer dans le moment même , il serait absurde de supposer qu'ils eussent eu le temps de la ré- flexion , et qne le comble du ridicule serait de les faire parler comme s'ils avaient pu méditer à loi- sir l'ordre et l'art qu'il leur faudrait employer pour arriver plus sûrement à leurs fins. C'est pour- tant sur ce modèle si déraisonnable, que sont faits la plupai^t des récits de nos tragédies, et on n'en connaît guère qui ne pècbe contre la vraisem- blance.

La troisième règle est que les récits soient ra- pides , parce qne les descriptions pathétiques doivent être presque toujours véhémentes, et qu'il n'y a point de véhémence sans rapidité.

ISos récits sont asservis à cette règle; mais il ne paraît pas que la plupart de nos tragiques la connaissent ou qu'ils se soucient de la pratiquer. Si leurs récits font quelque impression au théâtre, elle est l'ouvrage de l'acteur qui supplée par son art à ce qui leur manque.

Le style le plus vif et le plus serré convient à nos récits. Les circonstances doivent s'y précipiter les unes sur les autres; chacune doit être présentée avec le moins de mots qu'il est possible.

Ce n'est point àRacine^ comme poète, que l'on

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