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DE CHAMFORT. 29

lyrique (*) , qu'on compare ( ce qui pour le coup n'est ni moelleux , ni harmonieux ) l'ode qui commence par ces mots :

J'ai vu mes tristes journées ,

qui est sans contredit celle où il y a le plus de moel- leux , avec le chœur cVEsther :

Pleurons et géinissons.

C'est le même sentiment qui règne dans l'un et dans Tautre morceau. Il ne sera point difficile de le sentir , il faut comprendre ce que vous voulez dire. J'avoue que, pour moi, je n'y entends rien. Quelle comparaison y a-t-il à faire entre les pa- roles d'un convalescent qui parle de son mal, et les gémissemens d'une troupe de femmes qui sont près d'être égorgées, ainsi que toute leur nation? Je n'ai jamais vu de sentimens qui se ressem- blassent moins; encore si ces femmes étaient déjà sauvées, le sentiment aurait au moins cette res- semblance que , dans les deux morceaux , il serait question d'un danger passé; mais il n'y a rien de cela. Dans Rousseau , celui qui parle exprime sa joie , parce qu'il n'a plus rien à craindre ; et dans Racine , au contraire , ses femmes ont tout à craindre, puisqu'elles sont des victimes sur les- quelles le couteau est levé, et qui s'attendent à

( *) Tom. III , pag. 272.

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