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et anecdotes.

M. le Prince de Charolais ayant surpris M. de Brissac chez sa maîtresse, lui dit : sortez. M. de Brissac lui répondit : Monseigneur, vos ancêtres auraient dit : Sortons.

M. de Castries, dans le tems de la querelle de Diderot & de Rousseau, dit avec impatience à M. de R…, qui me l’a répété : cela est incroyable ; on ne parle que de ces gens-là, gens sans état, qui n’ont point de maison, logés dans un grenier : on ne s’accoutume point à cela.

M. de Voltaire, étant chez Made. du Châtelet, & même dans sa chambre, s’amusait avec l’Abbé Mignot[1], encore enfant, & qu’il tenait sur ses genoux. Il se mit à jaser avec lui, & à lui donner des instructions. Mon ami, lui dit-il, pour réussir avec les hommes, il faut avoir les femmes pour soi ; pour avoir les femmes pour soi, il faut les connaître. Vous saurez donc que toutes les femmes sont fausses & catins… Comment, toutes les femmes ? que dites-vous là, Monsieur, dit Mde. du Châtelet en colère ? — Madame, dit M. de Voltaire, il ne faut pas tromper l’enfance.

M. de Turenne, dînant chez M. de Lamoignon, celui-ci lui demanda si son intrépidité n’était pas ébranlée, au commencement d’une bataille. Oui, dit M. de Turenne, j’éprouve une grande agitation ;

  1. Alexandre Jean Mignot (1725-1791), neveu de Voltaire. (Note wiki)