Page:Chamfort - Maximes, Pensées, Caractères et Anecdotes, 1796, éd. Ginguené.djvu/56

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
xlviii
Notice

gien Dessault, qui malheureusement ne connaissant point assez son tempérament, se trompa sur la nature du mal : il le traita par des topiques & des cataplasmes émolliens. Le gonflement & les souffrances allaient toujours croissant : on se détermina enfin à une opération qui, faite plutôt, l’eût peut-être sauvé. L’humeur sortit en abondance, & le malade se sentit soulagé ; mais elle remonta dans la nuit : il eut un évanouissement très-long : le lendemain matin, une seconde crise plus longue que la première épuisa ses forces, & il expira le 24 Germinal de l’an ii de la République[1], non pas sur un grabat, comme le dit alors durement un journaliste[2] ; mais dans le très-modeste azile où ses malheurs l’avaient relégué ; du reste ne manquant d’aucun des objets ni des soins que son état exigeait, & entouré jusqu’à la fin de quelques fidèles amis.

La tyrannie dont il mourait victime était alors si puissante & la terreur si générale, que ce fut un acte de courage que de l’accompagner jusqu’à sa dernière demeure. Un très-petit nombre d’hommes fut jugé digne d’y être invité : la plûpart s’y rendirent, & malgré l’usage plus barbare que philosophique qui privait les funérailles de tout appareil, cette triste cérémonie ne fut ni sans honneur ni sans larmes.

Après les détails où l’on est entré dans cette Notice, il serait inutile de s’étendre sur le genre d’esprit & sur

  1. 13 avril 1794. (Note wiki)
  2. Le Républicain.