Page:Chamisso - L’homme qui a perdu son ombre, 1864.djvu/100

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 98 —

rant les hauteurs, en interrogeant les sources, en étudiant l’atmosphère. Tantôt j’observais des animaux, tantôt je recueillais des plantes ou des échantillons de roches. Je courais des tropiques aux pôles, d’un continent à l’autre, répétant ou variant mes expériences, rapprochant les productions des régions les plus éloignées, et jamais ne me lassant de comparer. Les œufs des autruches de l’Afrique et ceux des oiseaux de mer des côtes du nord formaient, avec les fruits des tropiques, ma nourriture accoutumée. — La nicotiane adoucissait mon sort, et l’amour de mon fidèle barbet remplaçait pour moi les doux liens auxquels je ne pouvais plus prétendre. Quand, chargé de nouveaux trésors, je revenais vers ma demeure, ses bonds joyeux et ses caresses me faisaient encore doucement sentir que je n’étais pas seul dans le monde.

Il fallait l’aventure que je vais raconter pour me rejeter parmi les hommes.