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des cieux. Le dieu, assis au milieu de la barque, est caractérisé par une tête d’ibis, couverte de la coiffure ordinaire, mais surmontée du disque et du croissant de la Lune : la légende qui l’accompagne, Ⲟⲟϩ ou Ⲓⲟϩⲑⲱⲟⲩⲧ, Ooh-Thôout, n’est que le nom du Dieu-Lune, réuni à celui du second Hermès ; tout comme le simulacre que ce double nom désigne, est formé des images combinées de la Lune et du second Hermès. L’identification de ces deux personnages mythiques ne peut donc plus être douteuse.

Un cynocéphale, animal également consacré à l’une et à l’autre de ces divinités, présente au dieu Ooh-Thôout (Lunus-Hermès) l’œil, symbole spécial des deux corps célestes qui répandent la lumière sur la terre ; ce même œil est figuré vers la proue de la barque divine dont l’extrémité, richement décorée, porte un disque pour désigner, selon toute apparence, que cette bari est celle d’une planète. Nous ajouterons, à ce sujet, que la consécration d’une des planètes à Hermès (Mercure) chez les peuples anciens, n’avait point lieu chez les Égyptiens ; ils purent donc sans inconvénient assimiler leur Hermès avec la Lune, car il est certain qu’ils consacrèrent à leur dieu Aroéri (Apollon)[1] la planète nommée Hermès et Mercure par les Grecs et par les Romains.

La poupe de la bari sacrée du dieu Lunus-Hermès, est recourbée d’une manière très-remarquable, circonstance qu’on a pu également observer dans l’une des barques du Dieu-Lune[2]. Cette appendice si extraordinaire me paraît représenter une queue de crocodile, animal essentiellement lié aux mythes du Dieu-Soleil et du Dieu-Lune. Enfin cette queue qui est recourbée nous rappelle encore ce passage d’Horapollon[3] Σκότος δὲ λέγοντες, κροκοδείλου οὐρὰν ζωγραφοῦσιν : pour représenter l’obscurité, les Égyptiens peignent la queue d’un crocodile. Ce rapprochement nous conduit à conclure que, par Ooh-Thôout, les Égyptiens pouvaient entendre le dieu qui présidait à la Lune en conjonction, c’est-à-dire à la phase où cet astre cesse d’être apparent sur l’horizon. On peut supposer que Ooh (la Lune) restait alors dans la partie inférieure et ténébreuse du Ciel, que nous avons vue être en effet du domaine de Thôout, le second Hermès[4].

  1. Pétau, Uranologium, p. 136.
  2. Voyez notre planche 14 (G).
  3. Hiéroglyphiques, liv. 1, § 70 ; édit. de Paw.
  4. Voyez notre planche 30 (A).