Page:Champsaur - Homo-Deus, Ferenczi, 1924.djvu/8

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ils n’avaient aucune illusion sur leur sinistre trouvaille. Jusqu’alors ils n’avaient guère accompli d’autres besognes que de renseigner des étrangers sur leur chemin, d’arrêter des cyclistes sans lanterne ou de ramasser des soûlauds incapables de retrouver leur demeure. Et ce premier contact avec le drame les jetait dans des transes.

— Jules, fit timidement l’un d’eux, faudrait tout de même savoir ce qu’on décide ?

— Oui, Hector.

Ils se regardèrent, pâles, et convinrent qu’il fallait ramasser le cadavre et le porter au commissariat. Mais, quand ils essayèrent de le soulever, l’un par les pieds, l’autre par les bras, ils le trouvèrent si lourd et ils tremblaient, surtout, tellement, qu’ils ne purent avancer. Alors, abandonnant le mort sur le trottoir, ils se concertèrent. Ne fallait-il pas plutôt laisser le « macchabée » où ils l’avaient trouvé, afin qu’on pût faire sur place toutes les constatations nécessaires ?

Résolution finale : Jules irait avertir le commissariat. Hector resta pour garder l’assassiné.

— Pauvre garçon !... Il était jeune et beau, ma foi ! Riche ?... Oui, car il est bien habillé. Alors, c’est pour le voler qu’on l’a tué !...

Il se pencha pour examiner la blessure. Aucune trace de sang. Pas une souillure ne maculait ses vêtements. Et le corps était encore chaud ! On aurait pu le croire seulement évanoui, si les yeux n’avaient eu cette poignante expression de terreur, trahissant une fin dramatique.

L’agent marmonna : « Pourquoi était-il sur ce banc ?... Allons, c’est la grande affaire, dont les journaux parleront...» Et le sergot se vit, en une seconde, mêlé à une cause célèbre. Il ferait une déposition sensationnelle ; les quotidiens, sans doute, publieraient la photographie de Jules et de lui, Hector.

Comme il songeait, survint une limousine luxueuse, conduite par un chauffeur au visage singulier. Elle allait