Page:Chansons de l Escalade, Geneve, Jullien, 1845.djvu/27

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27

Mai vaissia bin dés atré épenosse :
Quant i viron leu trai eitialla rotte
I ne povion désandre ne monta ;
Y et iqué yo i furon donta.

28

On leu dena d’abour la reveria :
Dé Genevoi i santiron l’épia,
Que freinavé d’onna bella façon.
I savion bin joui de l’espadon.

29

On Savoyar, uprè de la Mounia,
Y fu tüa d’on gran cou de marmita
Qu’onna fenna li accouilla dessu ;
I tomba mour, frai et rai eitandu.

30

Treize on an prai qu’étivon to an via ;
I desivon : « De no ossi pedia ! »
To an coudan qu’an payan leu rançon
I s’an irion saquion dan leu maison.

31

Mai le Conseil an granda dilijance
Fi leu procè, prononça leu sentance :
Qu’i sarion to pandu et eitranglia
Dessu l’Oyé, celi bio béluar.

32

Vaissia vegni Messieur de la Justice,
Et le cheuti que quemança de dire :
« La Bravada, va cria Tabazan ! »
« Ouai, sans failli, Monsieur, z’i vai de gran. »

33

"Te ne sa pas : y a bin de la besogne :
I son treizé qu’aron de la vergogne.
Y lou fau to pandré et eitranglia ;
Dépasse-té, que ze m’an voi alla."

34

Y fau bouta de l’oudre à la potance,
Et poi, avai dé courde an suffisance,
Pè lou gliéta et lou bin garotta,
Qu’i ne poission ne veri ne torna."

35

Vaqua parqué tota cela canaille
Recheutaron bin tou noutre mouraille.
En recheutan, i se rontion le cou,
Pè se garda du borro le licou.

36

On accouilla de la paille anfaraye
Dian lou fossé, qu’è bintou allemaye.
On gaitivé avoi on gran plaisi
Que la frayeur lous avai to saisi.

37

En attandan, i demandavon grasse,
Et priavon Noutra Dama de Grasse ;
I fassivon le segno de la croai,
Pè se faré passa la frai dé dai.

38

I desivon : "De no ossi pédia !
No vo priain de no sauva la via ! "
Y étivé Sonas et Chaffardon
Que ne puron zin avai de pardon.

39

Y avai voui zeur que dedian cela vella,
On présidan de Chamberi la bella,
Fassai sanblian de rafraichi l’union,
Y vin trama voutra gran trehison.

40

Vos aria to forcia, fenne et fellie ;
Poi aria prai leu pe belle dépoille ;
Et poi aprè, vo les aria tüa ;
Lou Menistro, vo lous aria brula.

41

Lou Menistro qu’étivon lou pe jouanne,
Vo lous aria to ansaina ansanblio ;
Dedian Roma vo lous aria meina
Pè lou montra à sa Satanita,

42

È cardinau et à la cardinaille,
Ès évèqué et à la cafardaille,
Que lous arion écorcia to vi ;
Su lou sarbon i lous arion ruti.


27. Mais en voici bien d’autres ! quand ils virent leurs trois échelles rompues. Ils ne pouvaient ni descendre ni monter. C’est là qu’ils furent domptés.

28. On leur donna d’abord la revirade ; ils sentirent l’épée des Genevois qui résonnait d’une belle façon ; ils savaient bien jouer de l’’espadon.

29. Un Savoyard, près de la Monnaie, fut tué d’un grand coup de marmite qu’une femme lança sur lui ; il tomba sur le coup mort et roide étendu.

30. On prit treize qui étaient tout en vie. Ils disaient : Ayez pitié de nous ! tout en croyant qu’en payant leur rançon ils s’en retournaient chacun dans leur maison.

31. Mais le Conseil avec grande diligence fit leur procès, prononça leur sentence : « qu’ils seraient tous pendus et étranglés sur l’Oie, ce beau boulevard. »

32. Voici venir Messieurs de la justice et le sautier qui commence par dire : La Bravade, va appeler Tabazan. — Oui, sans manquer, Monsieur, j’y vais de grand cœur.

33. Tu ne sais pas, il ya bien de la besogne ; ils sont treize qui auront de la vergogne ; il les faut tous pendre et étrangler. Dépèche donc, je veux m’en aller.

34. Il faut mettre de l’huile à la potence, et puis avoir des cordes en suflisance, puis les lier et les bien garrotter, de manière qu’ils ne puissent ni virer ni tourner.

35. Va donc, parce que toute cette canaille ressautera bientôt notre muraille ; en ressautant ils se rompaient le cou pour éviter le licou du bourreau.

36. On jeta dans le fossé de la paille allumée, qui s’enflamma bientôt ; on voyait avec grand plaisir que la frayeur les avait tous saisis.

37. En attendant ils demandaient grâce, et priaient Notre-Dame de grâce ; ils faisaient le signe de la croix pour se faire passer le froid de doigts.

38. Ils disaient : Ayez pitié de nous, nous vous prions de nous sauver la vie ; c’étaient Sonas et Chaffardon qui ne purent avoir leur pardon.

39. Il yavait huit jours, qu’un président de Chambéry la belle, faisant semblant de rafraichir l’union, vint dans cette ville tramer votre grande trahison.

40. Vous auriez violé et femmes et filles, puis vous auriez pris leurs plus belles nippes et puis après vous les auriez tuées ; les ministres, vous les auriez brûlés.

41. Les ministres qui étaient les plus jeunes, vous les auriez enchaînés tous ensemble, vous les auriez menés à Rome pour les montrer à sa Sainteté,

42. Aux cardinaux et à la cardinaille, aux évêques et à la cafardaille qui les auraient écorchés tous vifs, et les auraient rôtis sur le charbon.