Page:Chapais - Jean Talon, intendant de la Nouvelle-France (1665-1672), 1904.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
135
DE LA NOUVELLE-FRANCE

de l’époque. Sans doute il se trouvait alors des courtisans dont les adulations dépassaient toute mesure. Mais, en dehors des flatteurs intéressés, pour la masse des bons citoyens, la ferveur royaliste n’était que la forme naturelle du patriotisme.

Dans cette lettre au roi, Talon s’excusait de ne pas avoir participé en personne à la campagne contre les Agniers. Mais il avait fait tout ce qui dépendait de lui pour en assurer la réussite. Et c’était grâce à son activité et à ses efforts qu’elle avait été rendue possible.

Deux jours plus tard, il écrivait à Colbert : « Monsieur de Tracy et M. de Courcelle sont revenus de leur expédition, les Iroquois ayant pris le parti de se retirer et d’abandonner leurs habitations. Mon dit sieur de Tracy n’a pu en prendre d’autres que de brûler leurs forts et faire un dégât général ; c’est à ces deux messieurs à vous informer de ce qui s’est passé dans tout le voyage qui a demandé cinquante-trois jours de marche. Ce que je sais de la voix publique est qu’on ne peut rien ajouter à ce qui s’est fait de ce qui se pouvait faire, et que les ordres du roi auraient été exécutés et son attente entièrement remplie si ces sauvages avaient tenu ferme. À la vérité il serait à désirer qu’une partie eût été battue, et quelqu’autre prisonnière. L’âge avancé de M. de Tracy doit augmenter de beaucoup le mérite du service qu’il a rendu au roi, en prenant sur un corps cassé comme le sien une fatigue qui n’est pas concevable. On m’assure que dans tout le voyage, qui a été de trois cents lieues comprenant le retour, il ne s’est fait porter que deux jours ; encore y fut-il contraint par la goutte. M. de Courcelle, plus vigoureux que lui, n’a pu se défendre de se faire porter de même,