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DE LA NOUVELLE-FRANCE

encourageant pour celui qui l’envoyait que pour celui à qui il était adressé. Cependant, à la fin de cette lettre, Talon, revenant sur la question de son congé, laissait entrevoir une disposition d’esprit quelque peu chagrine. « Quand le roi, écrivait-il, me commanda de passer en Canada, Sa Majesté me fit l’honneur de me dire qu’elle ne m’y laisserait que deux ans ; mon congé ne peut venir avant ce temps. Je vous supplie très humblement, Monseigneur, d’avoir la bonté de me l’obtenir[1]. Je ne le demanderais pas si je me connaissais assez de génie et de talent pour bien m’acquitter de l’emploi que vous m’avez fait la grâce de me procurer, et policer un état naissant sans un secours comme est celui de M. de Tracy. Si, cependant, Sa Majesté croit que je lui sois utile, je n’ai pas d’autre volonté que la sienne et la vôtre ; commandez et quoiqu’infirme j’obéirai, faisant un sacrifice entier de ma personne à son service et à votre satisfaction. Je sais bien que je ne suis pas ici au gré de tout le monde, et c’est ce qui, joint à mon indisposition, me fait demander mon congé au roi. Si

  1. — Dans une autre lettre à Colbert, écrite presque en même temps que celle-ci, Talon proposait comme son successeur le secrétaire de M. de Tracy, Octave Zapaglia, sieur de Ressan : « Si vous me faites la grâce de m’envoyer mon congé, disait-il, et que vous vouliez entretenir une personne de la part du roi qui soit seulement chargée de la police et des finances, je sais que M. de Tracy vous propose M. de Ressan, son secrétaire. Souffrez, Monseigneur, que je vous le propose aussi pour ces deux chefs pour lesquels je lui trouve tout le talent nécessaire outre que je lui crois un bon fond de probité. » (Talon à Colbert, 12 nov. 1666, Arch. féd. Can., corr. gén., vol. 2).

    M. de Ressan manquait de modération ; et ayant montré une hostilité trop accentuée envers l’évêque et les Jésuites, il ne fut pas agréé.