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DE LA NOUVELLE-FRANCE

son exemple dans l’antiquité romaine, et peut répondre à celle en laquelle on donnait autrefois chez les mêmes romains les champs des provinces subjuguées qu’on appelait prœdia militaria ; la pratique de ces peuples politiques et guerriers peut à mon sentiment être judicieusement introduite, dans un pays éloigné de mille lieues de son monarque et du corps de l’état dont il n’est qu’un membre fort détaché, qui peut se voir souvent réduit à se soutenir par ses propres forces. Elle est à mon sentiment d’autant plus à estimer qu’elle fera quelque jour au roi un corps de vieilles troupes qui ne seront plus à charge de Sa Majesté, et cependant capables de conserver le corps de cet état naissant de Canada, avec tous les accroissements qu’il peut recevoir, contre les incursions des sauvages ou les violentes invasions des européens, même, dans les pressants besoins de l’ancienne France, fournir un secours considérable à Sa Majesté. » Il est certain que cette manière de coloniser en donnant des terres aux soldats licenciés était de nature à fortifier puissamment la colonie.

Outre les soldats, il y aurait aussi sans doute de vieux hivernants qui demanderaient des habitations. Ceux-là pourraient trouver moins agréable cette condition du service envers Sa Majesté ; mais leurs devoirs naturels, le point d’honneur, et la remise d’autres droits onéreux qui suivaient ordinairement les concessions, devraient les engager à accepter eux aussi cette condition, et on pourrait conséquemment la stipuler dans les contrats qui leur seraient passés.

Quant aux nouveaux arrivants, comme le roi semblait vouloir faire la dépense entière pour former le commencement des habitations par l’abatis du bois, la