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DE LA NOUVELLE-FRANCE

difficilement à cette importune réédition du cedant arma togæ. « Parmi de très bonnes qualités, qui en ont fait un des plus accomplis gouverneurs qu’ait eus la Nouvelle-France, dit Charlevoix, il avait quelques défauts, dont un des plus marqués était de manquer d’activité, et de ne vouloir pas néanmoins qu’on y suppléât, lorsque les affaires le demandaient. M. Talon de son côté croyait devoir aller toujours son chemin sans lui communiquer bien des choses, lorsqu’il craignait un retardement préjudiciable au service de Sa Majesté. »[1]

Il nous reste à parler d’une des questions les plus graves dont le conseil eut à s’occuper : la traite de l’eau-de-vie. La vente des boissons alcooliques aux sauvages avait été prohibée de temps immémorial dans la colonie. Le 2 mars 1657 un arrêt du conseil d’État[2] avait ratifié et renouvelé ces défenses sous peine de punition corporelle. Cependant, malgré ces prohibitions, des trafiquants cupides bravaient les lois et fournissaient aux sauvages, pour avoir à meilleur compte leurs pelleteries, cette eau de feu qui les transformait en bêtes féroces. Les plus effroyables désordres, les crimes les plus atroces, la plus scandaleuse démoralisation en

  1. — Talon écrivait à Colbert le 26 août 1666 : « Pour obéir à ce que vous me commandez de vous faire un portrait fidèle de M. de Courcelle, j’aurai ci-après l’honneur de vous écrire de ses qualités personnelles et de vous distinguer les bonnes des mauvaises. Je dis mauvaises parce qu’il n’y a pas d’hommes parfaits… À l’avance je vous assure que je garderai de si bonnes mesures avec lui et avec M. l’évêque de Pétrée que le repos du Canada ne sera jamais altéré par moi et que le service du roi ne souffrira aucune atteinte. » (Arch. féd. ; Canada, corr. gén., vol. II).
  2. — Édits et Ordonnances, II, p. 7.