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JEAN TALON, INTENDANT

ments. » On retrouve ici la singulière préoccupation de circonscrire l’action religieuse qui possédait alors toute une école de parlementaires et de ministres de la couronne. Elle faillit faire commettre à Colbert l’une des plus graves erreurs de son administration[1].

Durant son séjour au Canada, M. de Bouteroue s’occupa très activement de l’administration de la justice. Lorsque l’on parcourt les plumitifs du Conseil Souverain, on le voit assister à presque toutes les séances de ce corps ; on constate qu’il instruisait lui-même beaucoup de procès, et qu’il agissait comme rapporteur dans un grand nombre de causes.

Un des arrêts les plus importants rendus pendant son intendance fut celui du 26 juin 1669 relativement à la vente des boissons aux sauvages. On ressentait déjà les inconvénients de la décision prise le dix novembre précédent. Le conseil, considérant que des particuliers étaient allés dans les bois trente, quarante et cinquante lieues au devant des sauvages, pour leur porter de l’eau-de-vie afin de traiter avec eux, et que ceux-ci s’étaient enivrés et avaient commis des désordres, défendit strictement « à toutes personnes d’aller dans les bois au-devant des sauvages sous quelque prétexte que ce fût et de leur porter des boissons et marchandises pour traiter avec eux, à peine de confiscation d’icelle et de cinquante livres d’amende pour la première fois et de punition corporelle pour la seconde. »

  1. Histoire de Colbert, II, pp. 366 et suivantes. Colbert avait conçu la pensée de reculer l’ordination des prêtres à vingt-sept ans. Il voulait établir l’autorité du roi sur « la police spirituelle », et imposer certaines restrictions au recrutement des ordres religieux.