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DE LA NOUVELLE-FRANCE

Les salves de mousqueterie, les cris de « vive le roi ! » saluèrent cet acte solennel, tandis que les sauvages contemplaient avec étonnement et admiration cette scène imposante et grandiose. Le Père Allouez leur adressa un discours dans lequel il exalta la puissance et la gloire de Louis XIV, « le capitaine des plus grands capitaines, plus redoutable que le tonnerre, qui fait trembler la terre quand il attaque, et qui, par la décharge de ses canons, met en feu l’air et la mer. » M. de Saint-Lusson les harangua aussi « d’une façon guerrière et éloquente. » Puis, à la tombée du soir, la colline s’embrasa soudain, les rives du détroit s’illuminèrent, la flamme d’un immense bûcher se détacha sur le fond sombre de la forêt, éclairant de ses capricieuses lueurs les groupes pittoresques, et empourprant de ses reflets ondoyants l’écume argentée du rapide, dont l’éternel murmure accompagnait l’hymne d’actions de grâce, le Te Deum entonné par les missionnaires pour couronner ce mémorable jour[1].

Talon fut extrêmement satisfait du succès de cette expédition. Le 2 novembre 1671, il écrivait au roi : « Le sieur de la Salle n’est pas encore de retour de son voyage fait du côté du sud de ce pays ; mais le sieur de Saint-Lusson est revenu après avoir poussé jusqu’à près de cinq cents lieues d’ici, planté la croix et arboré les armes du roi en présence de dix-sept nations sauvages assemblées de toutes parts à ce sujet, toutes lesquelles se sont volontairement soumises à la domination de Sa Majesté qu’elles regardent uniquement et comme leur souverain protecteur. Cela s’est fait, au récit des Pères

  1. — Relation de 1671, pp. 20, 27 et 28.