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DE LA NOUVELLE-FRANCE

La route du golfe du Mexique, par l’intérieur du continent, était trouvée, et la Louisiane allait naître, après quelques années de tâtonnements et d’essais infructueux.

Comme on le voit, sous l’impulsion et la direction énergique de l’intendant Talon, une œuvre immense s’était accomplie. La Nouvelle-France, par ses explorateurs, ses missionnaires et ses traiteurs, avait achevé de marquer à son empreinte les trois quarts du territoire alors connu de l’Amérique septentrionale. Son influence morale, politique et commerciale, franchissant ses frontières, rayonnait à l’ouest, au nord et au sud. La croix et les lis étaient arborés par elle, des rives brûlantes de l’Arkansas aux plages glacées de la Baie d’Hudson, et des flots de l’Atlantique jusqu’aux derniers confins des grands lacs. Son prestige imposait le respect à cent peuples sauvages. Son incessante activité et ses hardis essors, suppléant au nombre et à la richesse, lui donnaient une supériorité éclatante sur les industrieuses, colonies anglaises resserrées et cantonnées prudemment entre l’Océan et la chaîne des Alléghanys. Ce n’était donc pas sans raison que Talon, plein d’un patriotique enthousiasme, s’écriait dans une lettre à Louis XIV : « Je ne suis pas un homme de cour, et je ne dis pas, par la seule passion de plaire au roi et sans un juste fondement, que cette partie de la monarchie française deviendra quelque chose de grand. Ce que j’en découvre de près me le fait préjuger, et ces parties des nations étrangères, qui bordent la mer, si bien établies, tremblent déjà d’effroi à la vue de ce que Sa Majesté a fait ici dans les terres depuis sept ans. Les mesures qu’on a prises pour les resserrer dans de très étroites limites par les prises de possession que j’ai fait faire ne souf-