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DE LA NOUVELLE-FRANCE

extraits des montres et revues ; en un mot « de faire et ordonner ce qu’il jugerait nécessaire et à propos pour le bien du service et ce qui dépendrait de la dite charge d’intendant de la justice, police et finances[1]. »

La tâche confiée à Talon n’était point médiocre. Elle demandait de l’intelligence, du savoir-faire, de l’énergie, du dévouement. Pour un officier public dont la carrière avait déjà été heureuse et paraissait encore pleine de promesses, c’était un rude sacrifice que de traverser les mers, de tourner le dos au champ fécond où l’initiative royale et ministérielle faisait germer tant de progrès et ouvrait de si glorieuses perspectives au talent laborieux ; et cela pour aller s’enfouir dans une colonie chancelante, afin d’y travailler obscurément, loin des regards du maître, à la tâche hasardeuse de réprimer la barbarie, et de faire sortir du chaos l’ordre, la paix et la prospérité ! Cependant Talon n’essaya point de se dérober à cette mission ardue. Il avait appris jeune à ne pas reculer devant les devoirs difficiles. En outre, il lui était bien permis d’espérer qu’on lui tiendrait compte de son abnégation, et que, malgré l’éloignement, le roi et le ministre apprécieraient les services rendus dans des conditions si extraordinairement méritoires.

Il eut, avant son départ, plusieurs entrevues avec Louis XIV et Colbert. Il reçut du premier l’assurance que son terme d’office au Canada ne serait que de deux ans. Le roi lui fit aussi remettre un long mémoire pour lui servir d’instructions. « Sa Majesté, y était-il dit, ayant fait choix du sieur Talon pour remplir cette charge (d’intendant du Canada), a considéré qu’il avait toutes

  1. Édits et Ordonnances, publiés à Québec de 1854 à 1856, en trois volumes, vol. III, p. 33.