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pieds de leurs armes ; elle rappelait aussi le tableau célèbre : « La garde du Drapeau. »

Doucement, je fis le tour des groupes, curieux de cette vie sauvage, épris du charme pénétrant qui se dégageait de cette scène inoubliable.

Des femmes dormaient sur le sol, gracieusement enlacées à leurs maris.

Dans l’abandon de leur sommeil, dans le rayonnement de leur beauté, ces hommes nus, qui serraient sur leur poitrine ces femmes nues et si belles, constituaient pourtant des groupes chastes. Et, dans l’admiration qu’ils m’inspiraient, pas une pensée libre ne monta à mon cerveau de civilisé vêtu et sceptique.

Le nu est-il donc si chaste ? la pudeur ne serait-elle que l’hérédité confuse de l’hypocrisie du vice ?

Ma promenade continuait. Comment ces hommes ne se brûlaient-ils pas ? Ils dormaient si près des feux clairs que je ne comprenais pas comment leur peau nue en supportait l’ardeur.

Mais je fus troublé dans ma promenade solitaire. Mes camarades venaient aussi voir le camp, et, pour mieux l’éclairer, ils projetaient sur les dor-