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les aspirations


Le colosse a la voix puissante du tonnerre,
Pour parler à celui qui tient en main la terre,
Et sa blanche vapeur, qu’il disperse en tous sens,
Monte vers Jéhovah comme des flots d’encens.
Il est irrésistible, il est inabordable ;
Nul ne remontera le torrent formidable.
L’homme le craint, l’oiseau le fuit, épouvanté.
Ce gouffre monstrueux a sa fécondité :
Il fait naître tout près des fleurs et les baptise
D’une poussière d’eau que le soleil irise.
Il existe depuis qu’un nouveau continent
A surgi tout à coup, sous le ciel rayonnant,
Dans toute la beauté que le poète rêve.
Il croulera toujours, il croulera sans trêve,
Jusqu’à l’instant où l’homme aura cessé d’aimer.
Et quand pour tout détruire et pour tout décimer,
Un ange descendra dans notre pauvre sphère,
Il verra, dans son vol, le Niagara faire
Luire au-dessus d’un roc, comme sur un autel,
L’effroyable splendeur du dernier arc-en-ciel.