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les invincibles

Entourent les vaisseaux portant des bataillons
Honteux d’être attaqués par des gens en haillons ;
Et les canons du fort, qu’on emplit de ferrailles,
Dans les flancs des voiliers font de larges entailles.
 
Les agresseurs, debout dans leurs frêles esquifs,
Qui semblent se cabrer comme chevaux rétifs,
Ouvrent bientôt le feu contre chaque équipage,
Qui se trouble et déjà redoute l’abordage, ―
Tirant leurs vieux mousquets d’un poignet aussi sûr
Que s’ils visaient le coude appuyé sur un mur.
Et partout les marins, hachés par la flottille,
Tombent comme les blés épais sous la faucille,
Et sur les étambots, les chaînes, les crampons,
Sur les sabords, les mâts, les étraves, les ponts,
Des cales aux huniers, le sang ruisselle et fume
En mêlant ses rougeurs aux blancheurs de l’écume
Des vagues qui jaillit sous les éclats d’obus.

Parfois un canot sombre avec des cris confus,
Coupé par un boulet ou criblé par des balles.
Et des soldats, cruels comme des cannibales,