Page:Chapman - Les Fleurs de givre, 1912.djvu/216

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Frissonnante du froid qui glace le tombeau,
Je désirais mourir à côté de ma fille.


― C’est bien ! mais la couronne.

                                              ― Arrivée à la grille
Du cimetière, hélas ! je compris mieux mon sort.
Cette fois dans le champ lugubre de la mort
J’entrais sans un bouquet, sans la moindre fleurette.
C’est alors que je fus coupablement distraite,
Et que je convoitai les trésors des défunts
Endormis sous leur tertre inondé de parfums.
Aux aguets, front baissé, je m’approchai du marbre
D’un tombeau que voilaient les rameaux d’un grand arbre,
Et sur qui s’effeuillaient des couronnes. C’était
Le tombeau d’une mère, et cela m’invitait.
Me glissant à travers d’épaisses graminées,
Je pris une couronne, une des plus fanées,
Qui semblait déparer ces offrandes de choix,
J’allai la mettre au pied de la modeste croix
De mon enfant. Voilà l’histoire de mon crime,
Et vous avez suivi mes pas jusqu’à l’abîme
De honte et de mépris où l’on veut me noyer.
Maintenant, dites-moi, pouvez-vous châtier
Une mère d’avoir eu la sainte faiblesse
D’obéir à son cœur débordant de tendresse ?