Page:Chaptal - Mes souvenirs sur Napoléon.djvu/17

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mort d’une fluxion de poitrine depuis quatre à cinq heures ; je reconnus ce jeune homme pour m’avoir servi plusieurs fois à ramasser mes boules dans mes parties au jeu de mail ; ce qui déjà me fit éprouver quelque peine. Néanmoins, je me mis en devoir de le disséquer, mais, au premier coup de scalpel sur les cartilages qui lient les côtes au sternum, le cadavre porta la main droite sur le cœur, et agita faiblement la tête ; le scalpel me tombe des mains, je m’enfuis de frayeur, et, depuis ce moment, j’ai abandonné l’étude de l’anatomie.

Déjà, la deuxième année, je m’étais occupé de l’étude de la physiologie ; cette partie avait de l’attrait pour moi, et les savantes leçons de Barthez entretenaient en moi un amour passionné pour cette étude. La troisième année, j’en fis, pendant six mois, ma principale occupation. L’habitude que j’avais prise à Rodez d’argumenter et de disputer sur tout me donnait un goût privilégié pour les systèmes ; et, comme la physique du corps humain est celle de toutes les sciences qui présente le moins de faits positifs, je me trouvais dans mon centre ; je discutais avec pédanterie et indifféremment le pour et le contre de toutes les hypothèses ; j’étais en querelle ouverte avec tous mes camarades ; je prenais constamment le contre-pied de leur opinion ; j’eusse peut-être persisté encore longtemps dans ce système puéril d’ergoterie, sans le concours de deux