Page:Charbonneau - Aucune créature, 1961.djvu/109

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

assimilé ces événements qui ne coïncidaient pas encore complètement avec son personnage. Surtout, il ne s’habituait pas au mensonge de tous ses actes, même les plus anodins.

Il fuyait d’instinct les occasions de se rendre à la maison des champs, de parler à Jeanne. Celle-ci n’ignorait plus sa liaison, il le savait. Elle avait sans doute pitié de lui. À tout propos, elle lui rappelait son âge. Cela lui échappait. Quant à lui, il ne pensait à son âge que dans les moments où sa femme le lui rappelait, lui révélant du même coup qu’elle y pensait tout le temps et à propos de tout, et alors qu’il avait l’impression de n’avoir jamais été aussi jeune.

Jean, de son côté, sans doute averti de la liaison de son père, par des amis, se montrait hostile. Il cherchait des occasions de le contredire, mais avec une certaine prudence pour ne pas éveiller les soupçons de sa mère.

Au milieu de ce malaise dont il se sentait responsable, Georges ressentait cruellement sa solitude. Ne pouvant parler de ce qui occupait tout son être, il lui fallait tenir des propos de table, répondre à des questions au sujet de son travail, pendant que son péché le brûlait, que son angoisse réclamait en aliment sa substance même.