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Page:Charbonneau - Aucune créature, 1961.djvu/75

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femme. Il voulait en exorciser son imagination.

C’est dans cet état d’esprit qu’il descendit la rue Sherbrooke et s’engagea rue Stanley. Un premier café avait des jardins, un autre, une terrasse sur le trottoir. Il reconnut ce dernier à la description que Sylvie lui avait faite de son « parking », avantage non négligeable en un temps où le moindre freluquet conduit son auto.

La jeune femme était là, attablée à la terrasse, en compagnie d’une amie. Son cœur battit très fort. Très droite sur sa chaise, exposée de tous les côtés aux regards, elle ne regardait rien, consciente seulement de la vague d’admiration qui venait battre contre sa table. Un souvenir sillonna la tête de l’écrivain : une jeune femme qu’il avait levée dans un bar à l’âge de vingt ans et qu’il avait revue ensuite une ou deux fois.

D’autres jeunes filles, très belles aussi, sirotaient du café noir dans de petites tasses de porcelaine. On était à peine à la fin de juin et leur teint n’avait pas encore été halé par les longues stations sur les plages à la mode, mais elles portaient toutes des robes vivement colorées et leurs yeux brasillaient dans la touffeur de la terrasse couverte.