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Page:Charbonneau - Les Désirs et les jours, 1948.djvu/88

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LES DÉSIRS

le courage du « jeune », comme ils l’appellent, et ne bougent pas. D’ailleurs, Arnim n’est pas aimé, et au fond d’eux-mêmes, les hommes reconnaissent que Massénac a raison.

Lancinet n’a pas compris ce qui s’est passé. Mais il voit que Massénac est le plus fort, que c’est à lui qu’il doit obéir.

À terre, Pierre Massénac a invariablement le mal du pays. Son ami Auguste, inscrit en droit, le laisse maintenant six ou sept mois sans nouvelles. Les lettres du jeune étudiant donnent froid au marin. Elles ne partent plus du cœur. Pierre les compare à des articles de revue : elles lui sont destinées, c’est vrai, mais elles ne lui apportent plus rien. Si encore Auguste lui donnait des nouvelles de Deuville, de son frère Claude, de sa sœur Louise, les seuls êtres auxquels l’exilé soit encore attaché, parce qu’ils touchent à Auguste. Il y a aussi Germaine Lavelle, restée pour Pierre le prototype de la femme. Les filles qu’il rencontre dans les ports : serveuses de bar ou de restaurant, danseuses vénales, Vénus de carrefour, ne lui ressemblent guère. Et le jeune homme qui déteste Deuville, où il a souffert et haï, aspire à y retourner riche et respecté.