Page:Chardon - Antonia Vernon.djvu/32

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resté ainsi longtemps, sans se rendre compte des heures qui s’écoulaient, si la porte du cabinet ne se fût ouverte brusquement pour laisser entrer ses deux filles, Hélène et Valérie ; elles s’approchèrent gaiement, embrassèrent leur père avec tendresse, et Valérie, la plus jeune et la plus insouciante des deux, ne s’apercevant pas qu’un nuage de sombre tristesse restait encore sur la figure de son père, lui dit en riant :

« Embrassez-moi deux fois, car c’est mon jour de naissance ; j’ai dix-sept ans… Aujourd’hui l’on me fête, et, comme à l’ordinaire, mes amies viendront déjeuner ici ce matin. »

M. Norbach eut un sourire qui faisait mal à voir, ouvrit son bureau, en tira une pièce d’or et la remit à Valérie en l’embrassant. Valérie sauta au milieu de la chambre d’un air joyeux, puis s’écria :

« Mais que fais-tu donc là, Hélène ? tu restes immobile comme une statue. »

C’était vrai, car Hélène lisait sur le front de son père, et son cœur était plein d’une inquiétude douloureuse. Sans rien dire, car elle n’aurait pu parler, elle s’approcha de lui, posa ses lèvres sur son front assombri, en baisa les plis avec une indicible tendresse, et le père comprit : il pressa la main de sa fille comme on serre la main d’un véritable ami.

Valérie n’avait rien vu.

« Mon père, dit-elle, j’ai invité Antonia Vernon,