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GRAMMAIRE DES ARTS DU DESSIN.

la lumière et de l’ombre. Il faut n’avoir jamais vu les temples de l’Attique ou ceux de la Grande-Grèce pour ne pas comprendre l’expression imposante de l’isodomum, et l’idée qui s’y attache infailliblement, celle d’un obstacle inattaquable.


emplecton.

Quand les murs devaient être d’une grande épaisseur, les anciens se contentaient d’en tailler régulièrement les deux faces, et ils remplissaient l’espace intérieur, resté vide entre les deux, avec une maçonnerie de blocage, ce qui veut dire qu’ils y versaient pêle-mêle des blocs de menues pierres dans un bain de mortier ; ainsi du moins en usaient les Romains, selon le témoignage de Vitruve. Le mur se composait alors de trois croûtes (crustæ), savoir : les deux parements et le remplissage. Mais les Grecs opéraient avec plus de soin : au lieu de ne remplir le vide qu’après coup, dit l’auteur romain, ils bâtissaient au fur et à mesure la maçonnerie intérieure et ils entretenaient constamment le niveau entre le milieu et les assises. C’est le système qu’ils appelaient emplecton (έμπλεχτόν).

Veut-on saisir le pourquoi de ces combinaisons mixtes et analyser le sentiment qu’elles expriment ? Il suffit de se rappeler l’impression de singulière mélancolie que chacun de nous a éprouvée dans les champs lorsqu’il y a rencontré un vieux mur de parc, un de ces murs sans assises visibles, sans forme et sans fin, qui penchent, qui bombent, qui végètent, et où l’œil ne peut saisir aucun rudiment de construction. C’est à peine si l’on soupçonnerait la main de l’homme dans ces murailles que l’art n’a point définies et qui ne sont pas plus de l’architecture qu’un pan d’étoffe n’est un babil ; mais si l’on aperçoit au prochain détour un jambage de porte, un linteau ferme ou une arcade, ou bien les pierres de taille qui encadrent un saut-de-loup, on est averti aussitôt que le mur informe se rattachait à des matériaux plus résistants, dans lesquels on retrouve l’horizontale et la verticale, l’assiette et l’élévation.

Les Romains ont mis en pratique deux autres genres de maçonnerie qui modifient sensiblement l’aspect de la construction : ce sont le reliculatum et l’incertum.