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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

J’ai profité de ce délai pour connaître le Japon, Yokohama et ses environs et la capitale, Tokio ; j’emportai les meilleurs souvenirs d’un peuple qui a été appelé le Français d’Orient, vu sa cordiale hospitalité, son goût artistique et raffiné, et je regrettai vivement que mon mandat ne me permît pas un séjour plus prolongé.

Parti le 20 octobre, nous arrivâmes à Nagasaki le 24.

Nous y descendîmes pour prendre un autre bateau de la même Compagnie, arrivant à Tchemulpo dans la matinée du 28.

Tchemulpo est le principal port de la Corée. En 1882, l’année des traités, c’était un petit village connu sous le nom d’Inchon ; aujourd’hui il a acquis quelque importance sous l’influence des marchands chinois et japonais, lesquels, en dehors d’une dizaine d’Européens, constituent le plus gros de sa population. Déjà, il y a deux hôtels, l’un tenu par un Chinois, l’autre par un Japonais, Daibutsu ; ce dernier était un ancien chef de cuisine à bord d’un navire américain, qu’il quitta pour s’installer dans la ville, d’abord comme boulanger et ensuite boucher, banquier, cordonnier, à ces métiers ajoutant celui d’hôtelier.

Le matin du 29, j’ai quitté Tchemulpo pour la capitale, distante, par voie de terre, de 35 kilomètres. La chaise à porteurs étant le seul moyen de transport permis à un officier, c’est ainsi que je me suis mis en route, porté par huit coolies. La route n’offre rien de remarquable ; elle traverse des champs de blé ou de riz et des villages composés des misérables huttes des coolies. Mappo, sur le côté droit de la rivière Han, que nous traversons en bac, est situé à 10 li ou 4 kilomètres de la capitale, dont il est, par le fait, un faubourg. C’est un village mesquin, habité par les riverains pêcheurs qui font le service entre la capitale et le port de Tchemulpo.

Le soleil se couchait lorsque nous arrivâmes devant les murs imposants de Séoul, et, franchissant la porte ouest, nous passâmes rapidement par les rues étroites pour gagner la résidence des États-Unis, accostés à chaque instant par des curieux qui, sans la moindre gêne, plongeaient leurs figures par les fenêtres de ma chaise en demandant : Nou-Gounya ? (Qui vive ?) et mes porteurs répondaient : So-Yang-Saram, un homme venu de l’Océan occidental ; ceci étant la désignation de tout étranger européen.

La résidence de tout gentilhomme, en Corée, est composée de plusieurs