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le peuple du pôle

en définitive que des animaux merveilleusement domestiqués et dressés ? Cette dernière hypothèse me parut d’abord la plus logique, peut-être parce qu’elle me plaisait davantage. Pour mieux me la confirmer à moi-même, — car, bien entendu, je continuais à ne parler de rien à Ceintras, — je cherchais des preuves et je me disais : « Nulle part, ni aux environs des trappes, ni près du ballon, je n’ai relevé l’empreinte d’un pied humainement conformé. Ceintras avait raison : nous devons avoir affaire à des troupeaux qui viennent paître durant la nuit. » Pourtant c’était en vain que je tentais de chasser de mon esprit l’image de la face par deux fois aperçue dans le cadre du hublot ; implacable était l’obsession de son regard presque humain, de ce regard que quelque chose éclairait… Et, malgré tous mes efforts, j’en arrivais constamment à cette supposition, qui pour moi représentait le pire : « Si c’était là l’homme du Pôle ? »

C’est qu’alors cela devenait horrible. Puisque la race polaire, retranchée du reste de la terre, n’avait pas évolué dans le même sens que les autres races humaines, il paraissait peu probable qu’aucun point de contact intellectuel et moral existât entre elle et nous. Si vraiment il en était ainsi, je ne pouvais plus garder l’espoir d’entrer jamais en relations avec mes hôtes.