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le peuple du pôle

revenus dans mon esprit, il ne me resta plus qu’à maudire l’imprudence de mon mouvement impulsif ; je comprenais bien qu’à cette heure décisive où se jouaient notre avenir et sans doute notre vie, le moindre de mes actes prenait une importance considérable, et que, dominant mes nerfs, je n’aurais dû agir qu’avec une extrême réflexion. Et voilà ! cet être qui s’était évidemment approché de moi sans dessein hostile, uniquement — après une longue hésitation, — pour m’examiner de près en plein jour et tenter peut-être d’entrer en relations avec moi, je l’avais, me jetant sur lui, mordu bestialement ! Ne courions-nous pas désormais le risque d’être considérés par le peuple du Pôle comme des animaux malfaisants et dangereux ?

Je repris le chemin du ballon, fort irrité contre moi-même. Je trouvai Ceintras sur la berge, en train de ranger ses lignes et se préparant au départ. Toute la journée, il avait été aussi raisonnable que possible, il ne me semblait pas que rien de fâcheux eût altéré cet état mental durant mon absence et, avec une certaine amertume, je pensais qu’après l’acte que je venais de commettre je n’avais guère le droit de me considérer comme beaucoup plus sensé que lui. Aussi, Ceintras m’ayant demandé les raisons de mon air pensif,