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le peuple du pôle

— Qui sait, ajoutai-je, s’ils ne croient pas que nous voulons les empoisonner ?

— Mangeons, en tout cas ; ils comprendront alors que nos intentions ne sont pas criminelles.

Tandis que nous mangions, ils resserrèrent leur cercle autour de nous. Puis, après une discussion animée avec ses compagnons, un d’entre eux, — l’ami de Ceintras, je crois, — s’approcha et nous offrit deux poissons curieusement desséchés qu’il tira de son manteau de cuir.

— Diable ! s’écria Ceintras, mais il me semble que nos affaires marchent très bien : ils ne veulent pas être en reste de politesse avec nous !

— Qu’allons-nous faire de ces poissons ? Les mangeons-nous ? Ils ne m’ont pas l’air très alléchants.

— Fais comme tu voudras. Moi, je mange le mien. Je crois que c’est préférable : ils n’auraient qu’à être vexés !…

J’entendis le poisson craquer sous les dents de Ceintras comme une croûte de pain dur.

— Est-ce bon ? demandai-je.

— C’est ignoble,

Et il l’avala stoïquement.

Le jour commençait à poindre. Le fleuve, devant nous, apparaissait comme une immense écharpe lumineuse négligemment jetée sur la plaine encore