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le peuple du pôle

moteur. Depuis quelque temps, — on s’était sans doute aperçu que nous avions découvert la cachette, — deux ou trois monstres restaient devant lui à poste fixe, avec la mission évidente de surveiller nos agissements. Alors Ceintras était envahi de furieuses colères que j’avais grand’peine à réprimer.

— Je ne sais ce qui me retient, me disait-il, de me jeter sur ces êtres stupides, de les assommer, de les écraser, de m’emparer par force du moteur !

Ensuite il demeurait de longues heures bougon et hargneux, injuriait les monstres, les bousculait au passage, et ceux-ci levaient sur nous de grands yeux doux et inquiets.

— Ce n’est pas raisonnable, lui répétais-je. Calme-toi, tu vas les effrayer.

Alors il me raillait sur ce qu’il appelait mon « penchant polaire » et prétendait que je me sentais un cœur de frère pour ces ignobles individus. Et ses moments de bonne humeur n’étaient guère moins redoutables. Il devenait facétieux, taquinait les monstres. Rien ne le réjouissait davantage que de leur envoyer la fumée de ses cigares à la figure pour les voir ensuite agiter la tête avec ennui, et il renouvelait à l’infini cette plaisanterie qu’il jugeait spirituelle. Incontesta-