Je me repentis aussitôt d’avoir agi si cavalièrement, car, avec le caractère irascible de Ceintras, il fallait s’attendre à tout. Mais il avait, pour l’instant, mieux à faire qu’à se formaliser de mon manque de courtoisie. Il me regarda comme s’il s’éveillait d’un pénible cauchemar et, d’une voix un peu incertaine, il me dit :
— Alors, cette expédition polaire… on y va ? C’est décidé ?…
Avec un haussement d’épaule je répondis simplement :
— Parbleu !
Il garda un moment le silence, puis les poings crispés par une sorte de rage impuissante, il s’écria :
— Mais pour quoi faire ! pour quoi faire, bon Dieu !
— Pour voir…
— Voir quoi ?
— Des choses que les autres hommes n’ont pas encore vues.
Il eut un ricanement à la fois désolé et méchant et, en répétant les paroles que je venais de dire, il en exagéra ironiquement le ton inspiré.
— Des choses… des choses que les autres hommes n’ont pas encore vues ! Mais que comptes-tu donc trouver là-bas ? Voyons, parle !