Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/424

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des forces en mouvement. Partout les individus ont pris conscience d’eux-mêmes. Partout ils redoublent d’effort. La classe ouvrière est sortie du demi-sommeil et de la passivité. Mais la petite bourgeoisie aussi est agissante. Malgré le poids du système économique qui si souvent l’écrase, elle n’a point tout à fait fléchi : elle tente de se redresser. Et si bien souvent elle demande son salut aux conceptions les plus rétrogrades, à la politique la plus détestable et au plus stérile et avilissant nationalisme, elle n’en est pas moins une force active et passionnée. Elle forme des ligues, et à Paris elle tient en échec la démocratie socialiste et républicaine. C’est dire qu’elle opposerait une résistance peut-être décisive à un mouvement social auquel elle n’aurait pas été gagnée peu à peu, au moins partiellement.

De même, les petits propriétaires paysans ont joué dans toute notre histoire, depuis la révolution, un grand rôle, tantôt de réaction, tantôt de liberté. Sauf quelques exceptions glorieuses et assez étendues, ils ont pris peur en 1851 du spectre rouge, et ils ont contribué au succès du coup d’état et de l’empire. Depuis, ils ont été peu à peu conquis par la république et ils en sont une des forces vives. Ils ont le sentiment très net de leur puissance politique. Ils sont entrés dans les municipalités ; ils