Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/453

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quelques-uns s’imaginent, il est vrai, que la grève générale, éclatant en bien des points à la fois, obligerait le gouvernement capitaliste et propriétaire à disséminer la force armée sur une telle étendue qu’elle serait comme absorbée par la révolution. C’est une conception d’une naïveté extrême. Le gouvernement bourgeois se préoccuperait avant tout de protéger les pouvoirs publics, les assemblées, en qui résiderait, par la volonté même des majorités, la force légale. Au besoin, s’il ne pouvait d’abord suffire à tout, il abandonnerait à la grève les voies ferrées et les régions où la révolution serait le plus fortement organisée ; il se préoccuperait, au contraire, de concentrer ses forces, et avec la puissance énorme que lui donnerait la volonté des représentants légaux de la nation, il ne tarderait pas à frapper quelques grands coups, à réoccuper les régions par lui abandonnées d’abord, et à rétablir les communications, comme on les rétablit en quelques jours dans un pays que l’ennemi vient d’évacuer après avoir fait sauter les voies ferrées et les ponts. Même si les pouvoirs publics perdaient un moment Paris, comme en 1871, — et avec les éléments sociaux dont se compose Paris, cela n’est pas certain le moins du monde, — il leur suffirait d’avoir un point de réunion et d’attendre en un lieu sûr, comme le roi de France à Bourges, comme M. Thiers