Page:Charles Perrault - Les Contes des fees, edition Giraud, 1865.djvu/118

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gardes, qui estoient rangez en haye, la carabine sur l’épaule, et ronflans de leur mieux. Il traverse plusieurs chambres, pleines de gentils-hommes et de dames, dormans tous, les uns debout, les autres assis. Il entre dans une chambre toute dorée, et il voit sur un lit, dont les rideaux estoient ouverts de tous costez, le plus beau spectacle qu’il eut jamais veu : une princesse qui paroissoit avoir quinze ou seize ans, et dont l’éclat resplendissant avoit quelque chose de lumineux et de divin. Il s’approcha en tremblant et en admirant, et se mit à genoux auprés d’elle.

Alors, comme la fin de l’enchantement estoit venuë, la princesse s’éveilla, et, le regardant avec des yeux plus tendres qu’une premiere veuë ne sembloit le permettre :

« Est-ce vous, mon prince ? luy dit-elle ; vous vous estes bien fait attendre. »

Le prince, charmé de ces paroles, et plus encore de la maniere dont elles estoient dites, ne sçavoit comment luy témoigner sa joye et sa reconnoissance ; il l’assura qu’il l’aimoit plus que luy-mesme. Ses discours furent mal rangez ; ils en plûrent davantage : peu d’éloquence, beaucoup d’amour. Il estoit plus embarassé qu’elle, et l’on