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Page:Charles d Orléans - Poésies complètes, Flammarion, 1915.djvu/206

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     Yver fait champs et arbres vieulx,
Leurs barbes de neiges blanchir,
Et est si froit, ort et pluieux,
Qu’emprès le feu convient croupir.
On ne peut hors des huis yssir,
Comme un oisel qui est en mue ;
Mais vous faittes tout rajeunir,
À vostre joyeuse venue.
     Yver fait le souleil, ès cieulx,
Du mantel des nues couvrir ;
Or maintenant, loué soit Dieux,
Vous estes venu esclersir
Toutes choses et embellir ;
Yver a sa peine perdue.
Car l’an nouvel l’a fait bannir,
À vostre joyeuse venue.


BALLADE V.

     Je fu en fleur ou temps passé d’Enfance,
Et puis après devins fruit en Jeunesse ;
Lors m’abaty de l’arbie de Plaisance,
Vert et non meur, Folie, ma maistresse.
Et pourcela, Raison qui tout redresse
À son plaisir, sans tort ou mesprison,
M’a à bon droit, par sa tresgrant sagesse.
Mis pour meurir ou feurre de prison.
     En ce j’ay fait longue continuance.
Sans estre mis à l’essor de Largesse,
J’en suy contant et tiens que, sans doubtance,
C’est pour le mieulx, combien que par peresse
Deviens fletry et tire vers Vieillesse.
Assez estaint est en moy le tison