Page:Charles d Orléans - Poésies complètes, Flammarion, 1915.djvu/52

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fin du Moyen Âge. Les états de dépenses de la maison d’Orléans nous fournissent tous les éléments de ce curieux travail. Ils nous montrent jusque dans ses plus intimes détails cette petite cour de Blois, élégante, paisible, brillante, ordonnée, pittoresque, grave et résonnant de rimes.

Les poésies que nous publions nous ouvrent aussi quelques-unes des perspectives de cette existence. Nous voyons dans cet échange de rimes, dans ces jeux poétiques, les idées dominantes, les amis de la maison, les personnages qui passent, les serviteurs qui pensent. Il faudrait creuser un peu et se laisser, trop peut-être, aller à l’imagination pour donner à tous les pîojtes qui s’agitent autour du prince une physionomie caractérisée ; mais nous y voyons comme correspondants ou comme compagnons en Apollon, des poëtes, des écrivains qui ont lai se quelque nom, Villon, René d’Anjou, Olivier de la Marche, Meschinot, peut-être Georges Chastelain, Robertet, Villebrême ; puis les princes et grands seigneurs Jean de Lorraine, Jean de Bourbon, le grand sénéchal, Jacques de la Trémoille, le cadet d’Albret, Boucicaut, Jean de Garancières, les sires de Tignonville, de Torsy, etc. ; enfin, les serviteurs et officiers du prince et de la princesse, Guiot et Philippe Pot, Boulainvilliers, Pierre Chevalier, Blosseville, les deux Caillau, Gilles des Ormes, Le Voys, Le Goût, Benoit d’Amien, Faret, Fraigne, Fredet, Cadier, etc. À ces distractions poétiques se joignait le jeu d’eschecs pour le prince, dont les partenaires principiaux sont Gilles des Ormes et Guillaume de Fontenay ; de dames, de marelle, ou de glic, pour la duchesse, qui joue le plus souvent avec Philippe ou Guiot Pot ; puis les plaisirs que les fêtes traditionnelles du Moyen Âge apportaient, et auxquels les bateleurs, les musiciens, les danseurs, les ménestrels de passage travaillaient ; puis encore venaient les voyages, les rencontres de princes, qui se rattachaient parfois à cette partie de la vie, grave et politique, que nous avons notée plus haut ; puis les messages qui apportent ou envoient les nouvelles, les livres, les joyaux ; enfin les promenades champêtres, les exercices de piété, les occupations administratives de ces immenses domaines, les aumônes, les dons. Oui, c’est bien là l’existence de Charles d’Orléans telle que nous la montrent les comptes de sa maison.