Page:Charles de Brosses - Lettres familières écrites d’Italie - ed Poulet-Malassis 1858.djvu/217

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pas être la dupe de tout ce que dit le Vasari à l’honneur de son École Florentine, la moindre de toutes, du moins à mon gré. Je laisse ceux-là, pour m’attacher à ceux du méchant temps comme plus curieux ; ainsi je vous ferai voir par préférence la Madone de Cimabue,, qui est probablement le premier tableau point dans l’Ecole Florentine, et qui ne me paraît point indigne d’un peintre de jeu de paume. Il n’y a ni dessin, ni relief, ni coloris dans ce tableau, que je ne puis mieux comparer qu’aux peintures sur les écrans de 2 sous. C’est un simple trait mal fait et barbouillé, à plat, de diverses couleurs. Les peintures du Giotto, successeur de Cimabue, sont beaucoup meilleures, quoique fort mauvaises.


La Chapelle Espagnole, peinte par Gaddo Gaddi, où il commence à y avoir du coloris, mais pas encore la plus petite ombre de dessin. Le cloître, en camaïeu vert, par Vecchio, qui, quoique méchant au possible, a des expressions qui ne déplaisent pas. La Vie de la Vierge et celle de saint Jean, dans le chœur, d’une manière plus moderne et qui commence à être bonne, par Domenico Ghirlandajo, mais surtout un devant d’autel, l’Enfer, le Paradis et le Purgatoire du Dante, à la chapelle Strozzi, par Orcagna, ditCione, qui y a mis son nom et le millésime 1357. On y trouve des idées tout-à-fait pittoresques, du feu, une composition hardie et de belles et bonnes têtes. C’est tout ce que j’ai vu de mieux pour être d’une aussi grande antiquité. Il faut remarquer aussi la sacristie qui est trèspropre et bien ornée.


Les pères de l’Oratoire et les Bénédictins ont d’assez bonnes architectures intérieures. Ces derniers possèdent une bibliothèque, ou plutôt un cabinet de livres, mais très-bien choisis, et force bons manuscrits.


Sainte-Félicité, église toute neuve et fort jolie, d’ordre corinthien architrave, où est le tombeau de Guichardin. Saint-Michel, fort orné de statues en dehors, et dont la principale est le Saint-Georges du Donatello.


Le vaste temple du Saint-Esprit, excellent ouvrage de Brunelleschi, tout de colonnes corinthiennes de pierres grises. Le chœur, qui est comme un petit temple au milieu du grand ; le baldaquin et le riche maître-autel de pierres précieuses, n’en sont pas le moindre ornement, sans parler de quantité de bonnes statues et de peintures