lors il n’est plus besoin de
regimber et s’en enquerir, mais simplement
croire : le plus grand et puissant moyen de
persuader, et la meilleure touche de verité,
c’est la multitude des ans et des croyans :
or les fols surpassent de tant les sages :
sanitatis patrocinium est insanientium turba
[1].
C’est chose difficile de resouldre son jugement
contre les opinions communes. Tout ce dessus
se peust cognoistre par tant d’impostures,
badinages, que nous avons veu naistre
comme miracles, et ravir tout le monde en
admiration, mais incontinent estouffés par
quelque accident, ou par l’exacte recherche
des clair-voyans, qui ont esclairé de près et
descouvert la fourbe, que s’ils eussent eu encore
du temps pour se meurir et se fortifier
en nature, c’estoit faict pour jamais. Ils eussent
esté receus et adorés generalement. Ainsi en
est-il de tant d’autres qui ont (faveur de fortune)
passé et gagné la creance publicque, à
laquelle puis on s’accommode sans aller
recognoistre la chose au gitte et en son origine :
nusquam ad liquidum fama perducitur
[2]. Tant de sortes de religions au monde, tant de
façons superstitieuses, qui sont encore mesme
dedans la chres-
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LIVRE I, CHAPITRE XLII.