Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome III, 1827.djvu/25

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estre plus richement despeinct qu’il a esté par un ancien, disant que c’est donner tesmoignage de mespriser Dieu et craindre les hommes. Qu’y a-il plus monstrueux que d’estre couard à l’endroict des hommes, et brave à l’endroict de Dieu ? Le perfide est après traistre et ennemy capital de la societé humaine : car il rompt et destruict la liaison d’icelle, et tout commerce, qui est la parole, laquelle si elle faut, nous ne nous tenons plus. à l’observation de la foy appartient la garde fidele du secret d’autruy : or c’est une importune garde, mesmement des grands ; qui s’en peust passer faict sagement, mais encore faut-il fuyr à le sçavoir, comme fit ce poëte à Lysmachus. Qui prend en garde le secret d’autruy se met plus en peine qu’il ne pense : car, outre le soin qu’il prend sur soy de le bien garder, il s’oblige à se feindre et desadvouer sa pensée, chose qui fasche fort à un coeur noble et genereux. Toutesfois qui le prend en garde le doibt tenir religieusement, et, pour ce faire et estre bon secretaire, il le doibt estre par nature, et non par art, ny par obligation.