Page:Chassignet - Le mespris de la vie et consolation contre la mort, 1594.djvu/118

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CXXIII.


Le service de Dieu cest la profession
Du chevalier Chrestien, qui constant en bataille
Contre ses ennemis resolu'ment chamaille,
Et non touché de peur fait sa commission ;

Sur la justice assis, non sur l'ambition
D'un orgueil esventé, à toute heure il travaille
Pour renverser la mort, & la part ou il aille
Tousjours pret à mourir, il est en action

Mais le soldat du monde engourdis de paresse
Endormis & couché, n'a pas la hardiesse
D'oser contre la mort un moment batailler ;

En fin elle le domte, & pendant qu'il sommeille
L'ensepulchre aus enfers, car tousjours ne s'esveille
Celuy que sans souci nous voyons sommeiller.


CXXIIII.


Comme ne craindre point la blessure mortelle
N'est pas incontinant tesmougnage certain
De constance ou de foy, procedant tel dedain
Ou d'un estonnement, ou d'un ceur infidelle ;

Ainsi tousjours la peur de la mort ne ruiselle
Ou d'une mesfiance, ou d'un jugement vain,
Ou d'un ceur entasché de pensement vilain,
Ains d'une passion humaine & naturelle.

La constance à mourir principalement doit
S'asseoir en JESUS-CHRIST, & combien elle soit
Aus uns beaucoup plus forte, aus autres plus debile

Moyennant toutefois que telle infirmité
Vienne t'avoir forfait contre la Deité
Ne desesperant point ; telle mort est utile.