Page:Chassignet - Le mespris de la vie et consolation contre la mort, 1594.djvu/159

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CLXXIII.


Ambicieus humains ce cors n'est il pas fait
Corruptible & mortel, formé d'une matiere
Sujette à pourriture, & reduite en poussiere
Aussitost que le coup de la mort l'a deffait ?

Comme avez vous le ceur de vice tant infet
Que vous ne pensiez point à ceste heure derniere
Qui doit faire pourrir sous l'oublieuse biere
Ce lourd fardeau de chair de nature imparfait ?

L'arondelle, la grue, & l'oiseau charitable
Ont sceu de leur retour la saison veritable
Separant de l'hyver le Primtemps & l'Esté :

Mais las ! l'homme accablé sous le fait de ses crimes,
N'apprehende de DIEU les jugemens sublimes
Comme s'il devoit vivre à toute eternité.


CLXXIIII.


Nous sommes tous mortels puisque la mort felonne
Est le pris du peché, & le peché trompeur
Rend indifferemment tout le monde pecheur,
Tentant à tout moment la conscience bonne :

Celuy quiconque vaint la mort en sa personne
Se fait tous les jours d'elle en ses membres vainceur
Et recevant de DIEU la grace & la faveur
Obtient par ses combas l'eternelle coronne.

Le CHRIST non seulement le regarde d'en haut
Ains luite avecque luy, & quant le ceur luy faut
De son bras Tout-puissant au danger il l'asseure.

Celuy doit seulement de la mort s'estonner
Qui ne veut avec DIEU heureusement regner,
Le sage pour mourir se dispose à toute heure.